Les Dionysies

FESTIVAL DE THÉÂTRE ANTIQUE (THÉÂTRE, MUSIQUE, DANSE)

DU 13 MARS AU 27 MARS 2023

Les Dionysies 2022 ont relevé la tête timidement, après deux ans de crise sanitaire : années de maturation des projets, et d’expérimentation des premières récitations de L’Odyssée avec manipulation de marionnettes. Cette fois, nous sommes au pied du mur. L’hiver s’installe, et les aèdes se préparent, mémorisent leur chant, ou leur portion de chant odysséen. Le défi est lancé. Dire de mémoire toute L’Odyssée ce printemps 2023, lors d’un marathon qui ne sera pas une lecture, mais une longue incantation, une succession d’aèdes, une alternance de voix qui ne cédera pas à un trop facile partage entre des « personnages ». Dans le moment épique d’Homère, ceux-ci sont pris dans la continuité de la récitation rythmée. Oh certes, l’aède se prend au plaisir du jeu. Ici c’est Ulysse qui gémit, là, Pénélope qui se lamente, là encore, un prétendant qui se gausse ou insulte. La poésie n’empêche pas la vie de s’incarner.

Aujourd’hui que L’Odyssée est parue en hexamètres, un livre aux éditions du Seuil, à nous de franchir ce seuil, de ne pas abandonner le poème au papier ! A nous de faire retentir toute l’action du verbe, tout le récit des aventures, l’un dans l’autre, la vie dans la parole, la parole dans le souffle.

Depuis sa ville d’Athènes, Socrate considère le travail des rhapsodes et des experts en sagesse. Hippias et Ion seront donc convoqués, sous l’autorité joueuse de Platon, par nos amis des Dionysies, pour ramener le verbe rythmé d’Homère à sa mise en question par le dialogue !

Une fois à Athènes, on reprendra l’héritage des tragédies, Perses d’Eschyle, parce que la guerre est toujours à nos portes, Antigone de Sophocle, parce que le devoir fraternel envers les morts incombera toujours aux vivants, Suppliantes d’Eschyle, pour que la leçon éthique (accueillir le réfugié venu d’ailleurs) soit aussi une leçon pour le théâtre (mimer nécessairement l’Autre que soi), sans oublier la comédie, empruntée au poète romain Plaute, avec Amphitryon, cette troublante leçon sur l’illusion du double, sur la répétition, figures si chères au théâtre. Des indépassables merveilles de vie, de force et d’harmonie viendront retrouver leur forme par la musique et la chorégraphie, par la métrique et par le geste !

Des visages-masques solitaires viendront, mystérieusement, basculant d’une langue dans l’autre : Iô, Médée, Cassandre, figures errantes venues de loin, arrachées à leur lieu de naissance pour expier dans l’exil à la fois une langue antérieurement proférée et une faute indélébile. Elles n’auront disparu que pour mieux revenir.

Excellentes Dionysies !

Philippe Brunet